Rétrospective Terminator 1/4 : Terminator
CYCLE TEMPS & IMAGINAIRE
Un classique de la Science-fiction qui hante la culture populaire depuis 30 ans. Une œuvre profondément désespérante qui aura su mettre en scène avec brio d’inextricables paradoxes temporels.
Terminator (1984) réalisé par James Cameron
« Los Angeles, 2029. Les machines s'élancèrent des cendres du feu nucléaire. La guerre totale pour exterminer l'humanité a fait rage pendant des décennies. Mais l'ultime combat n'aura pas lieu dans le futur. Il sera livré dans le présent. Ce soir. »
À l’origine de Terminator, il y a deux épisodes de la série Au-delà du réel (The Outer Limits 1963) : Le Soldat (Soldier) et La Main de verre (Demon With A Glass Hand), tout deux écrits par Harlan Ellison, un nom qui ne vous sera pas inconnu si vous lisez de la Science-fiction.
Si elle est précédée d’une réputation de blockbuster d’action, cette saga aura pourtant réussi à aborder comme peu d'œuvres audiovisuelles l'étourdissement du voyage dans le temps, ainsi que la dualité homme/machine, l’éveil de l’intelligence artificielle et le spectre de la fin du monde tout en étant profondément nihiliste derrière les apparats du grand spectacle.
Prototype ultime de la machine à tuer froide et implacable, que rien ne peux arrêter ou raisonner, véritable fusion entre la créature de Frankenstein et le requin des Dents de la Mer, le Terminator fascine autant qu’il effraie.
À la fois acharné, violent et psychopathe, le Cyborg est l’incarnation d’une humanité hypertrophiée qui s’effrite à mesure que le film avance et que les habits de chair humaine laissent entrevoir le métal et les microprocesseurs.
« Tu es la cible du Terminator »
Avant d’être un film de Science-fiction, le premier Terminator est surtout un film d’horreur tétanisant. Un affrontement froid, méthodique, mécanique, un duel de prédateurs qui se battent pour la suprématie.
Il faut dire que le méchant du film est incarné par Arnold Schwarzenegger, un choix de casting judicieux. L‘acteur tient ici le rôle de sa vie. Son allure de bulldozer, sa mâchoire carrée, son inexpression faciale, son invincibilité apparente. Il est littéralement monolithique, conférant à son personnage une réelle dimension synthétique à la limite de la vallée dérangeante.
Mieux, il a l’air extrêmement professionnel avec les armes à feu (une performance régulièrement saluée) et fait donc, n’ayons pas peur des mots, littéralement flipper !
La mise en scène de James Cameron est d’ailleurs pensée pour imposer la présence physique de son acteur. Surgissant toujours brutalement à l’écran, filmé uniquement par contre-plongées vertigineuses, distordant la réalité jusqu'à l’étirer comme du chewing-gum, le Terminator domine, à tous les niveaux.
« Le Terminator veut te tuer ! Tu ne peux pas lui échapper : il est programmé pour ça ! Il ne connaît pas la pitié, ni les remords, ni la peur ! Et rien au monde ne peut l'arrêter ! PERSONNE ! Il est ici pour te tuer ! »
« Je suis un ami de Sarah Connor. On m'a dit qu'elle était ici. Je peux la voir ? »
Pire, comme si son improbable stature ne suffisait pas, il est également un instrument d’infiltration implacable : après tout c’est lui qui conduit une voiture de police, il est même capable d’imiter les voix lorsqu’il prend la parole à la place de la mère de Sarah Connor, étendue morte à ses pieds.
Le Terminator retourne à son avantage une société hyper-consommatrice de produits High Tech (la technologie, bien que datée, est omniprésente dans le film), détourne les forces de l’ordre et utilise tout l’arsenal du système pour broyer (au propre comme au figuré) ses victimes.
Quant à la musique, elle possède l’impact d’un coup de marteau sur une enclume, avec des nappes froides et mécaniques qui immergent le spectateur dans une ambiance d’industrie lourde.
Car, le film est lourd, très lourd. Chaque scène parait peser des tonnes. La photo est sombre, lugubre, humide et glauque et Cameron semble ne filmer de Los Angeles que les zones les plus putrides, au milieu des ordures, des clochards et des laissés pour compte. Comme un avant gout de ce qui attend l’humanité en 2029, lorsque les machines rouleront sur les crânes humains.
« Je ne comprends rien... Mais comment ce type peut-il se relever vous l'avez tué ! »
Il faut dire que Cameron, budget réduit oblige, doit penser sa mise en scène de manière économique. On retiendra surtout les explications abracadabrantesques de Kyles Reese, en pleine course-poursuite, alors qu’il tente de convaincre une Sarah Connor complètement paumée de l’existence d’un Cyborg venu d’un futur apocalyptique et cauchemardesque.
« - Moitié homme, moitié machine. Son squelette est un mécanisme de combat hyper sophistiqué tenu par une chaine de micro processeur invulnérable et indestructible mais entièrement recouvert de tissu humain. La série précédente avait une peau synthétique, il était facile à repérer, mais pas lui. Il est comme un être humain il transpire, parle même, comme toi et moi !
- J’ai peut-être l’air stupide, mais des êtres comme ça n’existent pas...
- Non, c’est vrai, pas avant 40 ans... »
Terminator est un film traumatisant, qui a marqué au fer rouge l’imaginaire cinématographique. Certes, la forme a vieillie, elle est très ancrée dans les années 80 (le film est sorti en 1984), mais le propos n’a rien perdu de sa force. Que ça soit dans l’efficacité de sa narration fébrile qui emporte tout sur son passage et qui laisse le spectateur lessivé, ou dans l'étourdissement provoqué par le paradoxe temporel au centre du récit.
Pour toutes ces raisons et parce qu’il est sans concessions, j’ai de plus en plus tendance à considérer ce premier volet comme étant le meilleur de la saga.
À noter qu’en 2008, le film a été sélectionné par la National Film Registry pour y être conservé au sein de la Bibliothèque du Congrès américain, en raison de son importance culturelle, esthétique et historique.
- À paraître le 29/09/2014 : Retrospective Terminator 2/4 : Terminator 2 – Le Jugement Dernier
- À paraître le 03/10/2014 : Retrospective Terminator 3/4 : Terminator 3 – Le Soulèvement des Machines
- À paraître le 06/10/2014 : Retrospective Terminator 4/4 : Terminator Renaissance
Nicolas
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