Un peintre à la bibliothèque : Lucien Coutaud

Lucien Coutaud devant le palais de justice de Nîmes
 dans les années 60

A l’occasion de l’acquisition par la bibliothèque de deux catalogues raisonnés* des œuvres de Lucien Coutaud (1904 – 1977), récemment publiés par l’Association Lucien Coutaud, nous vous proposons de découvrir le fonds des manuscrits de Coutaud conservés par la Bibliothèque de Nîmes (un fonds est un ensemble de documents ayant le même producteur ou la même origine), dont l’inventaire détaillé a été mis en ligne cette année.

Ce fonds ancien est l'un des plus volumineux conservé par la Bibliothèque avec une cinquantaine de boîtes d'archives, des centaines de photographies et de nombreuses affiches. Il faut dire que Lucien Coutaud n'était pas seulement peintre : il exerce aussi le métier de décorateur de théâtre (pour Charles Dullin, Jean-Louis Barrault, Paul Claudel...), cartonnier de tapisserie (auprès de Jacques Adnet, Jean Lurçat avec lequel il participe au renouveau de cet art) et illustrateur d'ouvrages. Le fonds réunit donc à la fois les documents concernant les œuvres picturales du peintre tout au long du XXe siècle, sa correspondance avec de nombreuses personnalités du monde  artistique, françaises et étrangères, ses documents personnels, et de multiples photographies.

Ce qui frappe à travers ces documents, c'est surtout la variété des fréquentations du peintre. Partout des noms illustres apparaissent : Jean-Louis Barrault, Madeleine Renault, Charles Dullin, Alain Resnais, Boris Vian, Jean Blanzat, André Fraigneau, Jean Lurçat, Paul Eluard, Jean Paulhan, pour ne citer qu'eux. Lucien Coutaud est à la fois l'artiste secret et introverti, réfugié dans sa maison du « Cheval de Brique » en Normandie lorsque le tout Paris devient trop épuisant, mais aussi l'artiste mondain, invité aux salons de Marie-Laure de Noailles, aux bals parisiens et aux vernissages de ses multiples expositions. Celles-ci font le tour du monde : Paris, New York, Caracas, Rio de Janeiro, Sidney, Bruxelles, Stockholm, Rome, et particulièrement au Japon, où il est très apprécié et revient tous les ans à partir de 1953. Tout cela ne lui fait pas oublier ses origines : il naît en 1904 à Meynes, dans le Gard, et grandit à Nîmes où il fréquente en 1925 l’Ecole des Beaux-Arts. Ses liens avec André Fraigneau et Jean Blanzat datent de cette période.

Carte postale de Boris Vian
 « Mon cher Coutaud, vous me direz que cette carte postale est affreuse… »

Lucien Coutaud est donc adoubé à la fois par le milieu parisien, international ou artistique et par les institutions. Il reçoit la Légion d'Honneur en 1957, est nommé dans la première promotion des Chevaliers des Arts et des Lettres la même année, avant de recevoir le Prix des Beaux-Arts de la Ville de Paris en 1967. La correspondance en lien avec ces évènements est disponible dans ses archives, et témoigne d'un rayonnement artistique qui, en 1967, n'est plus à prouver. Son style reste proche de celui des surréalistes, empreint de mort et d'érotisme, mais aussi de tauromachie, qu'il emporte avec lui de son Gard natal, comme dans le tableau "Corrida éroticomagique". Jusqu’à sa mort, il ne dévie pas de sa trajectoire stylistique, ce qui lui vaut d’être relégué parmi les artistes déjà « anciens » alors que le pop art, l’art conceptuel ou le minimalisme rayonnent. Qu'importe, cela n'est pas sensible dans ses papiers et ses lettres. L'artiste reste fidèle à sa sensibilité, peu désireux d'obéir à des modes et des critiques délétères.

Tapisserie "Musique de chambre" de 1940,
 éditée par J. Adnet et la Compagnie des Arts Français et Pinton frères


Manon Durand

L’inventaire de ses archives est à retrouver en ligne sur la page des Bibliothèques de la ville de Nîmes, onglet « Etude et patrimoine » (à gauche) ou dans le Catalogue Collectif de France (CCFr) de la Bibliothèque Nationale de France (BNF) 


*un catalogue raisonné est un inventaire le plus complet possible des œuvres d’un artiste, avec leur localisation et l’autorisation des propriétaires des oeuvres

 

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