John CARPENTER : Ghosts of Mars 4/4

Nous arrivons au terme de notre cycle d'articles sur le réalisateur américain John CARPENTER, qui vient de recevoir au festival de Cannes le Carrosse d'Or pour l'ensemble de son oeuvre. Pour ce dernier volet, un focus sur un de ses films les plus rentre-dedans : Ghosts of Mars!


This is the end…


Ghosts of Mars, sorti en 2001, est le dernier vrai film de John CARPENTER. Je veux dire par là que s'il a un peu réalisé après cette date (le très sympathique The Ward et deux épisodes de la série "Masters of Horror"), c'est son dernier film 100% carpenterien, dans lequel il a signé non seulement la réalisation, mais aussi le scénario et la musique. C'est aussi une de ses oeuvres qui a le plus clivé son public : pour résumer en deux mots, ses fans ont adoré, les autres ont rejeté! Rien de surprenant, puisqu'on peut à bon droit considérer Ghosts of Mars comme son film le plus emblématique, de la même manière que Rapportez-moi la tête d'Alfredo Garcia avait été le film le plus peckinpahien de Sam PECKINPAH, un film-somme dans lequel l'auteur balançait toutes ses obsessions à la figure du pauvre spectateur!

Nous sommes en 2176, sur une planète Mars partiellement terra-formée. Quelques policiers débarquent à la gare d'une minable petite ville minière dans laquelle les attend derrière les barreaux le dangereux braqueur de banques "Desolation" Williams. Une mission de transfert qui semblait simple. Et qui devient soudainement très compliquée...lorsque les policiers découvrent avec horreur que la plupart des habitants de la ville sont désormais possédés par les esprits plus que belliqueux des guerriers de l'ancienne civilisation martienne…



Haches martiennes et gros tromblons


John CARPENTER n'a eu de cesse de déclarer tout l'amour qu'il portait au western comme genre cinématographique, ajoutant en général d'un air malicieux que TOUS ses films étaient des westerns déguisés. Ghosts of Mars est à cet égard un peu à part dans sa filmographie...puisque ce film est un western PAS DU TOUT déguisé!!
En effet, si l'on excepte une légère patine science-fictionnelle et fantastique (les âmes des guerriers martiens, le look des armes, l'évolution d'une société devenue matriarcale, etc...), tout respire le western à plein nez : les personnages, le train que l'on aperçoit traversant le désert dès les premières images du film, la ville minière, les Indiens/Martiens, et ainsi de suite. On retrouve par ailleurs tous les grands thèmes chers au réalisateur. Ainsi, la violence omniprésente, le sentiment d'encerclement (la partie centrale de Ghosts of Mars est un vrai film de siège), la paranoïa (avec le risque que les esprits martiens s'emparent des quelques terriens non contaminés)...ainsi qu'un solide  refus des conventions!



"Let's kick some asses!"



Ghosts of Mars, au même titre que sur certains de ses films, comme Invasion Los Angeles ou Los Angeles 2016, est aussi et surtout un bon gros coup de pied dans la fourmilière de la bienséance. Dès les années 1990 John CARPENTER avait entrepris de fustiger une certaine forme de pensée politiquement correcte qui lui semblait aller contre le sens des responsabilités réal d'un citoyen mature et responsable. Or, le fait est que TOUT dans Ghosts of Mars semble définitivement tourner de travers : une planète mal terra-formée, un matriarcat qui reproduit tous les travers de l'ancien patriarcat avec un nouveau conformisme qui se contente de singer le précédent système, et une forme d'hubris qui pousse à creuser de plus en plus profondément dans les entrailles de Mars, jusqu'à libérer des forces totalement incontrôlables. 

Alors oui, une fois de plus, John CARPENTER fait passer un message sous forme de fiction. Il nous dit qu'à force de créer un monde de plus en plus asservi et artificiel, on finira par susciter un retour de bâton particulièrement violent. Il y a un peu de l'écrivain Robert E. HOWARD chez lui, et dans son ambiance le film fait parfois songer à sa remarquable nouvelle "Au-delà de la Rivière Noire", avec le constat impitoyable que la Civilisation n'est qu'une parenthèse dans un monde voué à la barbarie. Les protagonistes du film ne font que confirmer ce sentiment. Ne survivent que les authentiques durs à cuire, ceux qui ne sont certes pas des enfants de chœur, mais que vous êtes tout de même bien content d'avoir à vos côtés. Les autres, les conformistes, les civilisés, les polis, les gentils, les timides...meurent. Tout simplement. La dernière phrase du film est à cet égard emblématique : "Let's kick some asses - Allons botter quelques culs". Tout John CARPENTER résumé en quelques mots!!

Bruno B. Bibliothécaire

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