Trois vieux films fantastiques par une nuit pluvieuse…


Imaginez… Vous êtes seul devant votre ordinateur, par un samedi soir pluvieux et sinistre, avec pour seul compagnon le « tic-tac » monotone de votre horloge. L’atmosphère embrumée finit par déteindre sur votre état d’esprit. Vous vous dites que tant qu’à faire, autant se mettre dans l’ambiance jusqu’au bout. Vous vous connectez alors sur C@roline, la plateforme de ressources numériques de Carré d’Art, et après quelques recherches vous jetez votre dévolu sur trois vieux films fantastiques, qui vous accompagneront jusqu’au bout de la nuit…



 
« La nuit de tous les mystères », de William CASTLE


On commence en douceur avec celui-ci. « La nuit de tous les mystères » est l’archétype de ce que j’appellerais le « fantastique-scoobidoo », du nom de la série TV animée des 70’s, dans laquelle les manifestations surnaturelles n’étaient jamais que le fruit de supercheries fomentées par des individus vénaux et sans scrupules.

Là, le décor est planté dès le départ : tout se passe dans les murs d’une villa que l’on prétend hantée, et dans laquelle les protagonistes (acheminés en corbillard !) devront passer la nuit. Le film est ouvertement roublard, mélange de l’Agatha Christie de « Dix petits nègres », de l’ambiance gothique des romans d’Anne Rice et de fête foraine macabre.

L’intrigue s’articule autour d’une galerie de personnages, bien peu recommandables pour la plupart, interprétés par des acteurs qui s’en donnent à cœur joie. Le grand Vincent PRICE, maître de cérémonie de cette nuit pas comme les autres, domine le casting par son élégance sarcastique et son ironie distanciée.

Joyeusement amoral, « La nuit de tous les mystères » est un train fantôme à l’échelle d’une maison, une sucrerie coupable digne d’une bonne histoire d’épouvante des EC Comics, que l’on regarde d’un air entendu et le sourire aux lèvres.





 « Le carnaval des âmes », de Herk HALTER

Beaucoup moins léger, « Le carnaval des âmes », pour être l’unique œuvre de fiction du documentariste Herk HALTER, n’en est pas moins un des films fantastiques les plus marquants des années 60.

A tout prendre, sa trame est assez similaire à celle d’un bon épisode de « La quatrième dimension » : une jeune musicienne organiste, prenant un nouveau poste dans une ville qui lui est inconnue, se met à avoir d’étranges hallucinations et se sent de plus en plus irrésistiblement attirée par le site d’un ancien parc d’attraction.

Seulement voilà, tout est dans l’art et la manière, et en ceci « Le carnaval des âmes » se distingue résolument du tout-venant. A mi-chemin entre le film de genre et le cinéma d’art et d’essai, il tire parti de sa magnifique photographie noir et blanc, de sa musique entêtante et surtout de son interprète principale, Candace HILLIGOSS, dont la présence, presque dans chaque plan, illumine le film de son charme fragile et mélancolique.

Il est difficile de décrire ce qu’est vraiment le « Carnaval des âmes » : une réflexion sur l’inéluctabilité de la mort et l’impossibilité d’échapper à son destin, une critique acerbe de la vie dans les petites villes américaines, un manifeste féministe…peut-être tout ça à la fois, ou encore autre chose, difficile à dire tellement le film est déconcertant.

Mais, au-delà de toute analyse cartésienne, laissez-vous avant tout porter par un film envoûtant, d’un charme aussi profond et fugitif qu’une poignée de pétales de roses lentement emportés par le vent de la nuit…




« La nuit des morts-vivants », de George ROMERO


Que dire de ce film qui ne l’ait déjà été cent fois ? En cette fin des années 60, George ROMERO renouvelait radicalement le genre par une bombe dont la déflagration se fait encore sentir presque un demi-siècle plus tard.

Si les deux films précédents pouvaient encore se rattacher plus ou moins à une mouvance, ce qu’annonçait « La nuit des morts-vivants » était quant à lui tout à fait neuf : un style vif et proche du documentaire, une violence frontale et non plus suggérée, une vraie réflexion politique et enfin la prise en compte des mass media dans la trame même de l’intrigue.

Tant de nouveautés en un seul film, et pourtant intégrées dans un cadre d’un classicisme absolu. Unité de temps (une nuit), d’action (les morts reviennent à la vie et cherchent à transformer les vivants en casse-croûte) et de lieu (une ferme investie par quelques survivants terrorisés). On est en plein dans la dramaturgie la plus rigoureuse, et c’est aussi ce qui fait la richesse de « La nuit des morts-vivants », cette épure rigoureuse,  dont tout le gras et l’inutile ont été impitoyablement bannis.

A une époque où on nous inflige du zombie à la tire-larigot pour tout et n’importe quoi (au cinéma, à la télé, en BD…), il convient de se souvenir que c’est ce film-là qui a inventé tout le décorum sur lequel s’appuient les fictions actuelles.

Et surtout de ne pas oublier que cette société décrite par ROMERO, gangrenée par la peur, l’égoïsme, la surinformation anxiogène et les manipulations scientifiques d’apprenti-sorciers, ce n’est pas celle d’une Terre lointaine ou d’un monde parallèle, c’est la nôtre. Hélas.




Bruno B. Bibliothécaire

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