Rétrospective Terminator 3/4 : Terminator 3 – Le Soulèvement des Machines
CYCLE TEMPS & IMAGINAIRE
Douze ans après Terminator 2, la franchise s’offre un troisième opus sans James Cameron. Réputé décevant, le film de Jonathan Mostow est pourtant extrêmement cohérent envers la mythologie de la saga.
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Rétrospective Terminator 2/4 : Terminator 2 – Le Jugement Dernier
À sa sortie en 2003, je n‘ai pas aimé Le Soulèvement des Machines. Je n’avais pas retrouvé l’ambiance du second volet, le film me paraissait moins sombre, entaché d’un humour lourd et malvenu.
Pourtant, avec le temps, j’ai fini par aimer ce Terminator et, par bien des côtés, à le trouver plutôt audacieux.
Sur la forme, Mostow ne cherche pas à concurrencer Cameron et livre un honnête travail d’artisan, conduit avec décontraction et second degré.
Il se permet même de nous offrir quelques moments d’anthologie, à l’image de la course-poursuite en plein Los Angeles ou le combat des machines dans lequel un Schwarzenegger hagard se prend la dérouillé de sa vie.
Et puis, l’ensemble du film baigne dans une ambiance de catastrophe imminente. Un sentiment d’urgence de plus en plus prégnant agite le film, alors que les dysfonctionnements informatiques se transforment petit à petit en gros bugs, puis en catastrophe planétaire.
« Elle est belle cette voiture !»
Certes, je déplore la sexualisation de Kristanna Loken, nouveau modèle évolué de Terminator, expressément conçu pour éliminer d’autres machines.
Car, ce n’était pas le cas des Cyborgs des deux premiers films. Terminator est un des rares films qui n’exploite pas l’imposante musculature de Schwarzenegger, pourtant culturiste. On sent que ça n’intéresse pas le réalisateur. Sa stature, son physique de bulldozer oui, mais ses muscles non.
C’est dommage de céder à cette facilité alors que la saga avait su s’en affranchir jusqu’ici. D’autant que, dans le respect de la tradition, l’actrice parvient à sembler synthétique dans ses attitudes, sa manière de s’exprimer et, surtout, sa démarche.
« Ce n’est pas arrivé, les bombes ne sont pas tombées, nous avons empêché le jugement dernier »
Terminator 3 (et dans une moindre mesure Terminator 2) déboule à l’heure d’Internet. La circulation de l’information a changé et plus rien n’est centralisé.
La destruction des locaux de Cyberdine et la mort de Miles Dyson ont certes considérablement retardé le déploiement de Skynet (de presque 10 ans, 1997 initialement, 2006 dans Terminator 3) mais n’ont rien empêché. Par conséquent, l’éveil des Intelligences Artificielles et donc le Jugement Dernier, est inévitable.
On peut le repousser, changer la manière dont il arrivera, mais il arrivera, tôt ou tard, quelques parts dans le temps.
En ce sens, Terminator 3 reste hyper cohérent envers l’univers mis en place par James Cameron : un dédale temporel inextricable au sein duquel le spectre sans cesse mouvant de l’apocalypse est d’autant plus menaçant qu’on ne fait que l’entrapercevoir sans jamais le voir vraiment.
De fait, John Connor ne semble pas non plus croire qu’il a réussi à empêcher le jugement dernier. On le retrouve sur la route, en mouvement perpétuel, sans adresse, sans véritable vie.
Car il n’est pas très fringuant le futur leader de la résistance humaine. Il est devenu un jeune homme rongé pour qui la route de la fin du second film, vierge et pleine de foi en l’avenir, est devenue un insondable couloir sombre et inquiétant duquel tout peu surgir.
« Tu n’es pas celui que je recherche ! »
L’essentiel du film s’attache donc à nous montrer le cheminement d’un homme qui s’est perdu, mal à l’aise dans la peau d’un personnage trop grand pour lui, écrasé par un destin hors norme dont il ne veut pas.
Parce que Terminator 3 est une démystification de John Connor, personnage quasi christique (John Connor = JC), apparu ex-nihilo, qui est ici un paria dont l’importance est considérablement relativisée.
Il est la cible prioritaire, mais pas exclusive, du T-X, également chargé d’éliminer les membres de l’état-major de la résistance humaine. Ainsi, la résistance, n’est-elle plus personnifiée uniquement par Connor, il s’appuie sur une équipe dont les membres sont suffisamment importants pour que Skynet cherche à les éliminer.
La meilleure preuve, c’est que le T-800 envoyé pour le protéger provient d’une époque ou John Connor est mort. Le cyborg n’est d’ailleurs pas programmé pour obéir à ses ordres, mais à ceux de sa femme, Katherine Brewster.
La guerre continue sans lui, son exemple et son héritage sont importants, mais c’est finalement le symbole, plus que l’homme, qui semble mener l’humanité à la victoire.
Un élément de réalisme élémentaire, certes moins romantique qu’un homme seul face à l’adversité, mais qui confère au personnage une dimension nouvelle et représente un apport immense à la saga.
En osant s’attaquer frontalement à un mythe, en prétendant faire de John Connor un homme névrosé, faible et finalement humain, en ayant l’audace de nous montrer un personnage réaliste et non pas un élu post-apocalyptique, le film ne pouvait que heurter les fans de Terminator.
« Qu'est-ce que tu veux dire ? Tu veux qu'on coure se cacher au fond d'un trou pendant que les bombes pleuvent ? »
Malgré tout, le T-800 est envoyé pour protéger en priorité Katherine Brewster et John Connor. Ce qui veut dire que la résistance humaine considère qu’il s’agit des éléments les plus importants de la résistance.
Car Terminator 3, s’il démystifie le personnage de Connor, s’emploie aussi à nous montrer son évolution et sa prise de conscience.
Contre toute attente, c’est la machine (Schwarzenegger, sculpté dans le marbre) qui va secouer ce John Connor apathique. En le piquant là où ça fait mal, en le mettant face à ses contradictions, en lui rappelant ce qu’il a traversé et le chemin qu’il lui reste à parcourir, il lui fait prendre conscience de son devoir.
Peut-être pas d’être un héros romantique, mais l’homme qui va unifier ce qui reste de l’humanité, ramasser les débris pour recoller tout ça dans un semblant d’unité.
John Connor doit accepter que son rôle n’est pas d’empêcher le jugement dernier (et ne l’a jamais été), mais d’y survivre, parce que sa connaissance du futur lui donne les armes nécessaires pour survivre et organiser la riposte.
Terminator 3 c’est donc l’histoire d’un personnage profondément humain, qui fait beaucoup d’erreurs, qui passe le film à se tromper de combat, avant de comprendre sur la fin ce que la machine cherche à lui dire depuis le début.
« Il s’était divisé en des milliers de serveurs informatiques sur toute la planète »
Car, la fin de Terminator 3 est exemplaire, un immense moment cinéma. Elle possède à la fois la saveur d’un twist inattendu (on se bat depuis le début alors que c’était perdu d’avance) et en même temps elle est une évidence implacable, le film ne pouvait que se terminer ainsi.
Une fin profondément nihiliste tant elle aura su jouer sur les espoirs des spectateurs, en leur faisant miroiter un Happy End pour mieux leur asséner un coup derrière la tête.
Ce n’est pourtant pas faute que le scénario s’acharne à nous expliquer depuis le début que le jugement dernier est inévitable et que les bombes vont péter.
« Le temps que Skynet devienne conscient, il s’était divisé en des milliers de serveurs informatiques sur toute la planète. Dans de banals ordinateurs, dans des immeubles de bureaux, des dortoirs, partout. C’était un logiciel dans le Cyber Espace, il n’y avait pas de mémoire centrale, il ne pouvait pas être débranché. L’attaque a commencé à 18h18, exactement comme il l’avait prédit. Le jugement dernier, le jour ou l’espèce humaine a été presque totalement anéantie par les armes qu'elle avait créé pour se protéger. J’aurais du comprendre, que notre destin n’avait jamais été d’empêcher le jugement dernier, c’était seulement d’y survivre, ensemble. Le Terminator le savait, il a essayé de nous avertir, mais je ne voulais rien entendre. Peut être que l’avenir est écrit, je ne sais pas, tout ce que je sais, c’est ce que le Terminator m’as apprit, ne jamais cesser le combat et je ne le cesserais jamais, la bataille ne fait que commencer. »
Encore une fois, nous sommes à l’ère d’internet, gagner la bataille ne pouvait pas être aussi simple que de déconnecter une prise.
Les Chroniques de Sarah Connor
À noter l’existence d’une série TV dérivée de la franchise : Les Chroniques de Sarah Connor.
On y retrouve Sarah et John Connor, accompagnés d’un cyborg à l’apparence féminine, Cameron.
Se déroulant dans la continuité de Terminator 2 – Le Jugement Dernier, la série se propose d’explorer des lignes temporelles alternatives qui ne mènent pas forcément à Terminator 3.
Même si elle ne possède pas de fin (malheureusement annulée au bout de sa seconde saison), cette série est à visionner absolument :
- Pour son angle inédit sur le terrain de la fusion homme machine. Le protecteur de John est ici une protectrice, un Cyborg à l’apparence féminine incarné par Summer Glau, ce qui amène divers éléments de tension sexuelle fort bien gérés.
- Pour son exploration délibérée des variations de lignes temporelles à donner le vertige, dans une valse de boucles de causalité, plaçant la série dans le contexte d’un futur sans cesse mouvant, repensé et remanié au hasard des actions entreprises dans le présent : frisson ultime lorsque deux voyageurs du temps qui se connaissent très bien découvrent qu’ils proviennent de deux lignes temporelles distinctes.
- À paraître le 06/10/2014 : Retrospective Terminator 4/4 : Terminator Renaissance
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