George MILLER Mad Max Fury Road

Après 30 longues années d’attente, un nouveau Mad Max voyait le jour en 2015. Dieu sait qu’on l’avait attendu, celui-là ! 30 années d’attente après un Mad Max – Beyond Thunderdome en demi-teinte, qui ne faisait pas honneur à l’ambiance de furie barbare qui traversait les deux premiers films de la série, des classiques d’un certain cinéma de genre. Et je peux vous dire une chose: 30 ans c’est certes bien long, mais si c’est pour voir un film pareil, ça vaut le coup !


Métal hurlant

Mad Max Fury Road, c’est avant tout une flèche du Parthe. Un tir décoché par surprise par celui-là même que l’on croyait en fuite, un ultime bras d’honneur d’un cinéma qui a été progressivement écarté des salles obscures.
Mad Max et Mad Max – The Road Warrior étaient des films populaires de leur temps, à l’époque des années 70 finissantes et du début des années 80. On l’a un peu oublié maintenant avec l’éloignement du temps, mais ces deux films ont marqué leur époque et imposé leur esthétique. Ils s’inscrivaient dans le contexte foisonnant qui permit la gestation de la première trilogie de la Guerre des Etoiles, les films de John CARPENTER, George ROMERO et Dario ARGENTO, pour ne citer que les réalisateurs les plus éminents.
Et puis ce cinéma est peu à peu tombé en désuétude au courant des années 90. Il n’a pas totalement disparu, mais il s’est retrouvé relégué dans les vidéoclubs puis dans les tréfonds des plateformes numériques. Par ailleurs, beaucoup de films appartenant à de « mauvais genres » (action, policier, fantastique, science-fiction…) se sont affadis et normalisés par rapport aux années précédentes, rejoignant les circuits classiques à grand renfort d’effets spéciaux et de scénarios nunuches. S’ils ont survécu, ce fut trop souvent, soit au prix de leur visibilité, soit au prix de leur âme




“It is hard to know who was more crazy : me – or everyone else”


Est-il vraiment nécessaire de présenter les Mad Max ? Hormis le premier opus, qui se déroule encore dans notre univers (mais déjà en état d’agonie avancée !), tous les films de la série présentent un monde post-apocalyptique, dans lequel des sociétés humaines livrées à elles-mêmes se battent farouchement pour conserver le peu qu’il reste de ressources naturelles en voie de disparition. Le terreau dont sont issus les premiers films est le punk, son énergie brouillonne et son nihilisme infini. Mais en 2015, le punk, à son tour, a été récupéré, digéré, assimilé par la culture mainstream. 


George MILLER, le réalisateur historique de la série, s’en était allé vers d’autres horizons : si Babe et Happy Feet sont des films plus qu’honorables, nul ne saurait assurément les confondre avec d’insupportables brûlots anarchistes ! Autant dire que les amateurs de cinéma de genre le pensaient perdu pour la cause, comme beaucoup d’autres qui sont progressivement rentrés dans le rang ou ont fini par jeter l’éponge. Et je tiens à être franc avec vous : c’est également ce que je pensais. Et, une fois n’est pas coutume, c’est avec une joie indicible que j’ai réalisé…à quel point je m’étais trompé !!


Mad Max Reloaded


Car Mad Max Fury Road, s’il reprend de manière évidente des codes contemporains et admet franchement l’influence du jeu vidéo, renoue sans conteste avec la rage de la fin des années 70. Une histoire filiforme mais efficace, des premiers rôles marquants (Charlize THERON, de facto l’héroïne du film !) et…de l’action ! Des voitures de malade ! Et surtout, encore meilleures que fantasmées, le clou du spectacle…des cascades sidérantes ! Sans doute parmi les meilleures de ces dernières années, qui atteignent et dépassent les plus grandes réalisations des films de Hong Kong. 


Le film pourrait se retrouver écrasé par une telle pyrotechnie, mais c’est tout le contraire qui se passe ! Le talent de George MILLER fait toute la différence. Au lieu de subordonner le film à l’action, il transforme cette dernière en moteur dynamique du long-métrage. Chaque cascade vient s’intégrer dans une logique interne imparable ; ainsi, les guerriers de la route s’adaptent à leur environnement, mettant en place des stratégies militaires innovantes propres au combat routier. C’est ainsi tout un monde post-apocalyptique cohérent, plein de bruit et de fureur, qui se déploie sous nos yeux écarquillés. 







The Lonesome Road Warrior


Eh bien voilà, au final le dernier c’est lui. George MILLER. Le dernier des Mohicans. George ROMERO est mort, après avoir été obligé de passer, certes en conservant intact le plus gros de son talent, sous les fourches caudines des producteurs. John CARPENTER est parti sur la pointe des pieds, se consacrant désormais à la musique. Dario ARGENTO semble avoir définitivement perdu tout son talent. Et d’autres, tant d’autres, qui ont fini par renoncer, ou qui ont sombré dans la médiocrité. 


Contre toute attente, coté à 10 000 contre 1, ayant presque fait oublier son passé de réalisateur hardcore, George MILLER a su prendre tout le monde de court. A 70 ans, il a expédié une mandale virile dans la tronche de tous ces réalisateurs branchouilles qui n’ont jamais été capables de raconter une bonne histoire en tirant tout le parti qu’offre l’expression cinématographique. 


Derrière l’action endiablée qui le traverse de part en part, Mad Max Fury Road raconte l’histoire d’un homme qui retrouve petit à petit son humanité. La première image du film, provocatrice en diable, montre Max de dos, farouche et déguenillé, silhouette solitaire et blessée de celui qui, malgré les épreuves, a survécu à tout. Il faut toujours se défier des analyses faciles, mais tout de même, difficile d’imaginer que George MILLER ne se soit pas identifié à cette figure de guerrier de la route finissant par assumer son humanité…


« C’est le fond de la nature humaine que de mener des batailles qui sont le plus souvent perdues, ou qui au mieux n’engendrent que des succès temporaires ou limités.
Ce n’est pas pour autant qu’il faut cesser de se battre »
Jacques SAPIR

Bruno B. Bibliothécaire

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